Journaliste, Animateur Télé

Vous avez sorti le film « Fractures » en novembre 2018. Pouvez-vous nous raconter l’histoire ?

FRACTURES met en scène la confrontation de deux personnages principaux aux antipodes l’un de l’autre comme en accouche parfois la France d’aujourd’hui. Le parcours de l’un d’eux l’a amené au cynisme et à la prostitution, l’autre s’est converti à un islam dévoyé et violent. Ces deux personnages, Fariha et Youssouf, vont à une même soirée sur un bateau. Tous deux vont se retrouver enfermés dans la pièce du bateau où Fariha a découvert l’arsenal terroriste de Youssouf. Ce bateau et la fête qui s’y déroule sont en fait un prétexte pour confronter des radicalités opposées.

Quelles ont été vos inspirations pour ce projet ?

J’ai puisé l’essentiel de mon inspiration dans deux choses. La première a été ma série documentaire « en immersion » sur TF1. Elle m’a permis de constater que la France actuelle est constituée, en partie, de communautés de fait. Les identités et les identités radicales s’y côtoient. La deuxième chose c’est ma créolité qui me faire dire que l’on peut créer ou recréer du lien à partir de la différence. Car nos sociétés créoles sont nées de la rencontre entre des êtres humains qui estimaient être à l’opposé les uns des autres : des maîtres et des esclaves.

Pourquoi avoir choisi le nom « Fractures »?

Ce nom était assez évident pour moi au vu du constat que je viens d’exprimer et qui constitue le socle de mon film. « Fracture » est un terme d’actualité puisque depuis la sortie de mon film le mouvement des gilets jaunes en a révélé une béante au sein de la société française : la fracture sociale. Il y en a une encore plus grave peut-être, celle dont je parle dans mon film, la fracture identitaire.

Votre film parle de radicalités et de religion. Quel message avez-vous voulu faire passer ?

Je dirai plutôt qu’il parle « DES » radicalités et parmi celle-ci, une qui utilise un discours religieux pour pousser à la violence. Ces radicalités étouffent nos humanités et le dialogue, même contraint, forcé, violent peut permettre de réveiller ces humanités endormies et de recréer du lien entre nous. Un lieu suffisant que le pire soit évité.

Pourquoi avoir fait le choix de ne pas le diffuser au cinéma ?

La production de ce film a été indépendante et atypique, ça fait partie des films qu’on peut même appeler « sauvages », dans le sens où on n’a pas de financement CNC. Le seul financement public que nous avons reçu c’est le financement de la Collectivité Territoriale de Martinique grâce à des personnes qui ont été sensibles au projet. De plus, dans un cadre comme celui-ci, quand vous n’avez pas les financements du CNC, quand vous êtes déjà un peu en dehors du système, c’est très compliqué de le faire diffuser au cinéma, et je pense que j’aurais pu vivre une expérience très désagréable si j’avais décidé de le sortir en salle.

Et aujourd’hui FRACTURES est diponible en DVD chez les principaux distributeurs et en VOD sur Itunes, MyTF1VOD, MycanalVOD, Orange.

Par Morgane Chanteloup